ETUDE DU DEVELOPPEMENT DES CLIVAGES DANS LES PEINTURES DES ANNEES CINQUANTE

Plusieurs œuvres datant de la fin des années cinquante ont montré ces dernières années une certaine propension au clivage : la couche picturale appliquée par le peintre s’est soulevée, recroquevillée, décollée de la toile de façon plus ou moins spectaculaire.

Détail d’un soulèvement de couche picturale sur une œuvre de Pierre Soulages (1959)







Ces soulèvements de couche picturale sont souvent attribués à la technique du peintre (peintures épaisses) mais des recherches récentes, menées à l’Institut national du Patrimoine puis grâce au soutien financier du Centre national des Arts Plastiques ont montré que l’épaisseur des couches picturales n’était pas la seule cause de ces défauts d’adhérence. En effet, les matériaux utilisés par les artistes, en particulier ceux se fournissant chez Lefebvre-Foinet, constituent une source d’altération.








De nombreux artistes ont utilisés des toiles pré-enduites à base de blanc de plomb. A cause de l’interdiction de ce pigment en 1948, les fournisseurs de matériaux pour artistes n’arrivaient plus à obtenir les qualités optimales du pigment. Pour les artistes qui réalisaient des peintures épaisses et non mates, des « préparations grasses » à bases de blanc de plomb étaient nécessaires : pour ces peintures, des défauts apparaissent : la préparation subit une transformation chimique, où le carbonate de plomb (blanc de plomb) réagit avec les acides gras de l’huile pour former un carboxylate de plomb. Ce « savon métallique » se forme préférentiellement à l’interface préparation/couche colorée et entraîne un décollement de la couche picturale.





Quelles sont les solutions de conservation et de restauration ?




Les refixages réalisés pour un certain nombre d’œuvres ont été des échecs : sans prendre en compte la présence de savon métallique, les adhésifs adhèrent seulement quelques mois et le phénomène risque de s’accélérer et de s’étendre les années suivantes.
Des tests d’adhésifs ont été effectués en laboratoire. L’utilisation d’adhésifs en solution dans les solvants proches de zones de solubilité des carboxylates donne de bons résultats pour les œuvres qui ont été traitées ; mais il est essentiel que le restaurateur en charge de ces œuvres puisse mettre en évidence la présence ou non de savon métallique pour adapter son traitement.





Traitement d’un soulèvement : l’adhésif est appliqué en quantité minimale à la seringue puis la couche picturale est aplanie à l’aide d’une spatule souple.




Quelques recommandations aux collectionneurs
Afin de limiter le développement de ces altérations, il est essentiel de réunir les conditions de conservation pour ralentir le phénomène. Les œuvres doivent être transportées, stockées et exposées dans des espaces où l’humidité relative est stable, autour de 55%HR. Les chocs hygrothermiques doivent être limités au maximum, puisqu’à chaque nouvelle fluctuation, les savons métalliques réagissent et altèrent l’adhérence entre les deux couches de peinture.

Sources :



L’étude des problèmes d’adhérence des peintures des années cinquante a été focalisée sur le cas des œuvres de Pierre Soulages de 1959. L’ensemble des recherches effectuées dans ce cadre peut être consulté dans les mémoires et articles suivants :

HELOU - DE LA GRANDIÈRE (Pauline), LE HÔ (Anne-Solenn), MIRAMBET (François), “Cleavages in paintings by Pierre Soulages at the end of 1950’s: a case study”, Contribution for Preparation for Painting: the artist’s choice and its consequence, ICOM-CC, May 31st and June 1st 2007 , British Museum, London, Archetype Ed, 2008.

HELOU - DE LA GRANDIÈRE (Pauline), « La restauration de ‘Peinture, 114 × 165 cm, 16 décembre 1959’ de Pierre Soulages », in patrimoines, revue de l’Institut national du patrimoine, n°2, 2006.

LA GRANDIERE (Pauline de), Technique classique - Problèmes contemporains, étude et traitement de Peinture, 114 x 165 cm, 16 décembre 1959, Musée d’Art moderne de la Ville de Paris. Mémoire de fin d’études, Institut national du Patrimoine, septembre 2005 (Les illustrations en sont issues).

LA GRANDIERE (Pauline de), Conservation report on Peinture, 8 décembre 1959 by Pierre Soulages, Kunstsammlung Nordrhein Westfalen K20-K21 – Düsseldorf, May-July 2004, rapport de stage, Institut national du Patrimoine, juillet 2004.




Pauline de La Grandière est restauratrice de peinture, diplômée de l’Institut national du Patrimoine (IFROA). Reconnue par les Musées de France et les Monuments Historiques, ses recherches récentes sur les œuvres de Pierre Soulages ont permis de comprendre les processus d’altération des peintures des années cinquante et d’obtenir des solutions de restauration.




Pauline Helou-de La Grandière
11 avenue de la Chasse Royale
37360 Semblançay
06.75.13.75.28.
p.heloudelagrandiere@gmail.com

Portrait de Gaillard par Auguste Blondel


L’œuvre appartient au Musée des Beaux-Arts de Nantes depuis la donation des descendants de Monsieur Gaillard en 1920. Se sont ces derniers qui ont indiqué l’identité du portrait ainsi que sa date d’exécution.D’après les lettres consécutives à la donation, le portrait représente Louis-Joseph Gaillard, un ‘dessinateur amateur’ né à Nantes en 1819 et mort dans la même ville en 1899. Son portrait par Blondel daterait de 1836.Il est possible qu’il y ai eut confusion avec Claude-Ferdinand Gaillard (Paris 1834-1887), mais dans ce cas le portrait ne daterait pas de 1836. Claude Ferdinand Gaillard était peintre d’histoire, de portrait et graveur, élève de Léon Cogniet. Vers 18 ans, il faisait quelques essais d’eau-forte, et, pour vivre, travaillait à des gravures de mode chez Hopwood et Le Couturiere. En 1856, il obtient le Grand Prix de Rome pour la gravure. A la suite d’une cruelle maladie, il meurt en pleine possession de son talent à 53 ans. Il existe un portrait de l’artiste : achat du Vte Bauer, 13 février 1924, portrait de l’artiste 580 frs (Source : Emmanuel BENEZIT, Dictionnaire des peintres, sculpteurs, dessinateurs et graveurs, Tome 4, Librairie Gründ, 1956, p.129).



Auguste-Georges Blondel serait lui né à Nantes en 1799 et mort dans la même ville en 1872. (voir La tricoteuse, dessin conservé au musée des Beaux-Arts de Rennes).Aucune mention de traitement de conservation-restauration préalable n’est faite dans le dossier d’œuvre consulté le 25 mai 2007.L’observation de l’œuvre avant traitement indique pourtant qu’un traitement important a été réalisé au début du XXe siècle.
Un premier constat d’état permet d’observer un rentoilage à la colle de pâte. L’observation des zones de soulèvements et lacunaires montre cependant la présence d’une couche picturale sous-jacente à la composition visible, qui pourrait avoir des conséquences sur l’adhérence de la couche picturale et expliquer la forme atypique du réseau de craquelure.


L'existence d'une couche picturale sous-jacente est confirmée par la radiographie, qui montre l’existence d’un portrait sous-jacent, composé à l’inverse du portrait de Gaillard. Il s’agit d’un homme d’une cinquantaine d’années, placé en buste. La radiographie met également en évidence la toile originale (trame visible), les traces du châssis initial à écharpes (diagonales visibles dans les angles supérieurs), le réseau de craquelure.Format : les dimensions 91,35 x 73,08 cm correspondent au format standard XVIIIe siècle (Pernety) de 30 sol. Transformé au XXe par le 30 figure.







Un mélange de solvants à base majoritaire d'isopropanol a été utilisé pour solubiliser le vernis et une partie des repeints débordants ou des surpeints.




















Après nettoyage, les lacunes sont comblées avec un mastic à base de blanc de meudon et de colle de peau. Un vernis général est appliqué sur la surface de l'oeuvre (résine naturelle), puis les retouches sont effectuées uniquement sur les mastics, afin de rendre son homogénéité à l'oeuvre et sa lisibilité.



Un vernis final est vaporisé sur l'ensemble de l'oeuvre (résine synthétique), puis l'oeuvre est ré-encadrée (le cadre a été légèrement amménagé pour limiter les frottements de la feuillure sur la surface picturale).


Un dos protecteur (carton cannelé à réserve alcaline) est vissé au revers de l'oeuvre pour limiter les variations hygrométriques et l'empoussiérement par le revers de l'oeuvre.

Scène Galante, XVIIIe siècle.

Vue avant intervention

Cette œuvre souffrait de soulèvements importants de la couche picturale : le préparation, qui est la couche située entre la toile et la couche de peinture proprement dite, est très réactive aux variations climatiques, à cause de la proportion importante d’argiles qu’elle contient. Ce phénomène est très courant pour les œuvres du XVIIIe siècles qui sont peintes sur des préparations colorées.

Ces zones de faiblesse d’adhésion doivent être traitées en toute urgence, puisque le phénomène peut se propager à l’ensemble de la peinture, entraînant alors la perte de la peinture originale.



Détail d'un soulèvement avec lacune

Détail d'un soulèvement avec lacune

Un REFIXAGE est alors opéré : il s’agit d’introduire un adhésif stable et souple dans les zones de clivages. Une colle protéinique réalisée à base de vessies natatoires d’esturgeon est utilisée pour ses très bonnes propriétés adhésives et mécaniques. Après une dizaine d’heures de refixage, l’ensemble de la couche picturale est adhérant et plan.


Le NETTOYAGE de l’œuvre consiste à supprimer les éléments qui gênent la lecture de l’œuvre à sa surface. Un décrassage a d’abord été opéré (à base d’eau et de tensioactifs non ioniques). Des tests de solubilité de vernis ont été effectués (voir Blog 07/06/2007).
Tests de nettoyage

Une fois le mélange de solvant trouvé, l’ensemble du vernis a été supprimé.

Cette peinture a cependant été largement restaurée précédemment (il y a une cinquantaine d’année). De cette restauration subsistent des repeints huileux, qui se sont oxydés rapidement, et sont donc aujourd’hui désaccordés. Ces repeints débordent sur la couche picturale originale et gênent largement la lecture de l’œuvre. Sur ces repeints, une couche de vernis, qui s’est elle aussi oxydée, a été appliquée. Les repeints huileux ont été ramollis seulement avec des solvants plus polaires, et supprimés de façon mécanique au scalpel. Une vingtaine d’heures a été nécessaire pour parfaire cette opération.
Détail montrant les désaccords de repeints anciens dans un visage

Enfin, les zones lacunaires nombreuses ont été comblées avec un mastic (voir Blog 11/07/2007) et réintégrées avec des couleurs pour restauration.





Vue d'ensemble après masticage

Dans certaines zones où une oxydation trop forte de la couche picturale résultait du contact prolongé des repeints huileux, un glacis a été ajouté en surface pour rendre l’image lisible et homogène. Après quelques heures de retouche, l’œuvre a été vernie et rendue à son propriétaire.

Vue d'ensemble en cours de retouche (avant vernissage)

CHAUVIN, Environs de Naples, REINTEGRATION

« Ce nom est pourtant digne de mémoire. [...] Chauvin possède un dessin savant comme Bertin, mais avec plus de chaleur dans le coloris. Les sites choisis de la terre italienne ont rarement trouve d'interprète plus fidèle et plus habile. »
Paul Marmottan, les Nouvelles archives de l'art français, 1889
Etat avant intervention

Etat après nettoyage


Pierre Athanase Chauvin est né à Paris en 1774 et mort à Rome en 1832. Elève de Valenciennes, il débuta au Salon de Paris en 1793 (médaille première classe en 1819). Il se fixe à Rome en 1813, où il devient membre de l’Académie de Saint Luc. II épouse en 1812 Albertine, la fille de Charles Hayard, marchand de couleurs dont la boutique était fréquentée par les peintres français de la villa Médicis, en particulier par Ingres.


Signature


L’œuvre est signée en bas, à droite. La signature est à peine lisible. Une marque de cachet est visible à gauche de la signature, mais le sondage effectué dans cette zone ne permet pas de lire ce dernier.
Etat Général





L’œuvre est en bon état (restauration récente). L’œuvre a été rentoilée il y à plusieurs décennies, la toile qui porte le numéro d’inventaire et le châssis datent de cette intervention antérieure. La toile apparaît relativement tendue, mais elle peut certainement retrouver son élasticité en atmosphère plus sèche, sans que cela nécessite d’intervention particulière. La restauration récente a consisté en un allègement du vernis et suppression des repeints. Les lacunes apparaissent visibles.Le cadre est en bois doré, il présente quelques lacunes. L’étiquette de l’encadreur « Préa-bert, successeur de Poissonneau et Co, 8, rue JJ Rousseau, Nantes » est visible sur le montant supérieur du cadre.


Propositions de traitement



La proposition initiale est la suivante : « La tension de la toile sera contrôlée dans les conditions climatiques des salles d’exposition (toile relativement réactive). La lacune principale sera réintégrée de façon illusionniste après avoir ajusté le niveau de mastic (légèrement en ressort par rapport au plan de la couche picturale). Quelques usures pourront également être reprises ».En cours d’observation, cette proposition est revue, en accord avec le conservateur, Cyrille Sciama. Nous décidons d’approfondir le nettoyage, qui laisse apparaître des hétérogénéités de vernis. L’objectif est d’obtenir une surface homogène et unie d’une part, et de garantir la suppression complète des repeints débordants et désaccordés.


Traitement



Le cadre a été démonté et dépoussiéré.Un dépoussiérage important du revers est effectué (pinceaux doux, aspiration). Un décrassage est effectué à l’eau à l’aide d’une éponge microporeuse au revers. Une clé est réalisée en hêtre teint au brou de noix pour remplacer la clé manquante.Suppression des amas de vernis et des repeints (dans la zone ancienne de déchirure). La solubilisation des vernis est effectuée à l’aide d’un bâtonnet de coton avec un mélange en proportion variables d’isopropanol et de White Spirit. Certaines zones du repeints sur supprimées au scalpel, le mastic est solubilisé à l’eau.Sur cette image, les repeints désaccordés sont visibles à l'emplacement d'une ancienne déchirure.


La suppression des repeints permet d'assainir la surface peinte afin d'assurer une retouche ajustée.
Un vernis à base de résine cétonique brillante est appliqué au spray sur la surface picturale après évaporation des solvants. La zone de retouche est isolée au vernis Laropal (résine urée-aldéhyde).




La réintégration picturale consiste à combler le niveau de lacune à l'aide d'un mastic (constitué de charge inerte telle que le carbonate de calcium et de liant comme la colle de peau).




Sur ce mastic, qui est strictement limité à la zone lacunaire, des points de couleur sont apposés. Il ne s'agit pas de peinture mais de pigments liés dans un vernis stable et neutre pour la peinture originale.



Voici les images de la retouche de la lacune du Paysage de Chauvin:








Après deux sessions de 3 heures environ, la éintégration est invisible, mais elle reste détectable pour un oeil averti.

BibliographieEmmanuel BENEZIT, Dictionnaire des peintres, sculpteurs, dessinateurs et graveurs, Tome 2, Librairie Gründ, 1955, p.466. Œuvre citée dans la notice de Chauvin, sous le titre « Paysage, environ de Naples ».Anne Foster, « Pierre - Athanase Chauvin (1774 – 1832), Un protégé de Talleyrand », La gazette de l'Hôtel Drouot, n° 11 - 16 mars 2001.

Portrait de Louis-Joseph Gaillard par Auguste Blondel


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PROPOSITION DE TRAITEMENT



La proposition initiale consistait à démonter le cadre, refixer en priorité les zones fragiles et reprendre les déformations de la toile, proposer un protocole d'allègement de vernis et de suppression de repeints, avant de pouvoir réintégrer les zones lacunaire et revernir l’ensemble de l’œuvre.

L’observation des zones de soulèvement et du réseau de craquelure révélant une présence de composition picturale sous-jacente, un examen plus approfondit de l’œuvre est effectué : une radiographie est commandée avant d’entamer le traitement (juin 2007).


Les tests de nettoyage


Suivant l’approche de nettoyage développée par Paolo Cremonesi, la solubilisation de la résine du vernis peut s’envisager dans un premier temps par l’action « modérée » des solvants organiques neutres, qui agissent sur les liaisons secondaires des molécules de résine (action physique), selon le principe suivant : les liaisons intermoléculaires du solvant se substituent aux liaisons intermoléculaires des solides quand ils ont la même polarité. Les tests consistent donc à mesurer la polarité du vernis, en effectuant une échelle de micro-solubilisations du vernis par des solvants à polarité croissante. Les mélanges utilisés pour évaluer cette échelle sont constitués d’un solvant non polaire (Ligroïne, polarité Fd :97, Fp :2, Fh :1) et d’un solvant polaire (utilisés successivement : éthanol Fd :36, Fp :18, Fh :46 et acétone Fd : 47, Fp :32, Fh :21) ;


Un mélange de solvant contenant un alcool comme l’isopropanol semble le plus interessant (le mélange 50 % Ligroïne/50%Acétone donne de bons résultats ; sa polarité est celle de l’isopropanol). Les repeints sont solubles à des polarités bien plus élevées (acétone pur). pour ces composés, la procédure de nettoyage se fera à l'aide de gels.



Paysage animé de Prosper Barbot


Les opérations ont été effectuées comme suit :
- Démontage du cadre (suppression de 4 clous)
- Protection de la face, avec pose de deux papiers Bolloré à la méthyl cellulose (Klucel G à 10% dans l’eau)
- Dépoussiérage du revers avec suppression de scrupules,
- Examen de la face.
- Suppression de la clé gênant l’accès par le revers à la déchirure
- Décrassage du revers
- Tests de décrassage et décrassage de la face
- Mise dans le plan de la déchirure
- Collage bord à bord avec un mélange d’adhésif PVA/Plextol B500
- Masticage face
- Retouche
- Vernis

Traitement des déchirures

Pour le traitement des déchirures, une humidification aqueuse très locale de la toile, autour de chacune des déchirures, permettant un apport minimal et contrôlé d’humidité a été effectué pour relaxer les fibres de la toile. La zone a pu être massée et mise sous poids après récupération progressive de la déformation qui a abouti, à terme, au repositionnement bord à bord des déchirures.
Les études récentes relatives au choix de l’adhésif de collage du fil à fil révèlent que le PVA (VR 200) est le plus adapté à cette utilisation, grâce à sa forte résistance à la traction. Son pouvoir collant est satisfaisant et il présente une souplesse intermédiaire convenable. Le Plextol B 500, adhésif acrylique, est lui, trop souple : malgré sa très bonne stabilité, il ne permettrait pas un maintien suffisant.
Pour assouplir le PVA au moment de la mise en œuvre, il est choisit de mélanger ces deux adhésifs. Le collage fil à fil a ainsi été effectué avec un mélange à parts égales en volume de PVA (VR 200 : Acétate de polyvinyle en dispersion aqueuse, Tg=28°C) et d’acrylique (Plextol B500 : Dispersion acrylique à base d’acrylate d’éthyle ( 60%) et de méthacrylate de méthyle (40%). Tg=16°C).
Le collage s’est fait dans le frais (évaporation progressive de la part aqueuse de l’adhésif), après avoir appliqué des points de colle. Un renfort a été fait ponctuellement par apposition de fils encollés dans la trame.

Décrassage

Pour le décrassage, une série de tests a été effectuée afin de déterminer la méthode la plus adaptée aux salissures présentes.

Le principe du décrassage est de solubiliser les salissures grasses accumulées au fil du temps à la surface de la peinture, sans affecter le vernis et la couche picturale. Les solutions nettoyantes utilisées sont choisies pour leur affinité avec les crasses (composées notamment d’ions métalliques divers), et leur innocuité à la surface du vernis ou de la peinture. Les solutions décrassantes sont généralement aqueuses (sauf pour le nettoyage de l’or), et varient selon leur pH (le vernis étant acide, un pH acide de la solution permet d’éviter toute attaque acido-basique), l’ajout de tensio-actif (le principe de la tête hydrophile et de la queue lipophile des tensio-actif permet un nettoyage des crasses par composition de micelles hydrosolubles) ou par l’ajout d’agents chélatants (qui forment des complexes en insérant les ions métalliques des crasses dans des pinces de complexants : ils permettent de solubiliser les sels)

Une solution gélifiée a été testée. Cette solution présente la particularité d’augmenter la mouillabilité en abaissant l’évaporation, et de baisser la diffusion du liquide dans la peinture. Une solution composée d’eau basique (pH 8.5), de complexant (citrate) et d’hydroxy-propyl-cellulose a été testée.

Tests effectués pour le décrassage
Salive, Action des tensio-actifs et des bactéries (suivi d’un rinçage), ++
Eau, pH neutre, ++
Gel de citrate, Gel tamponné à pH 6 (acide) suivi d’un rinçage, +
Eau pH 8.5 + citrate + Hpc, Gel tamponné à pH 7 (neutre) suivi d’un rinçage, +
Eau ultra pure, pH acide, +++
Traimmonium citrate 3 %, Agent chélatant suivi d’un rinçage, +

C’est l’eau ultra pure (pH 6) qui présente la meilleure efficacité sur les crasses présentent en surface e l’œuvre. Le décrassage est effectué au bâtonnet de coton légèrement imprégné d’eau ultra-pure. Le résultat est satisfaisant après deux passages.

Après décrassage, l’oxydation du vernis apparaît clairement, mais la position initiale peu interventionniste est maintenue.

Prosper Barbot


Prosper Barbot (1798-1878). Après avoir été l’élève de Watelet et de Jules Coignet, il devient le compagnon de Corot et Bodinier en Italie (1824-1828). Il expose au Salon de 1827 à 1840, où il est récompensé d'une médaille d'or en 1827, peignant ensuite en Algérie (1842) et en Égypte (1844-1846). Dès 1828, et jusqu’à sa mort, il est installé en Anjou (Chambellay). Dans cette ville, il habitait la maison de l'architecte Georges Le Chatelier (1857-1935), époux de la petite-fille et dernière héritière de Posper Barbot, née Henriette Garnon. L’œuvre est entrée dans les collections du musée des Beaux-Arts à l’occasion du legs Le Chatelier en 1936.

Vernissage(s)

L'allègement du vernis a permis de retrouver une homogénéité optique satisfaisante. Un vernis satiné a été appliqué pour protéger l'oeuvre et garantir un aspect de surface homogène.

Un monogramme: GR







Un monogramme "GR" est inscrit en bas à droite, en lettres rouges. Il s'agit, comme le confirme le sujet et le style du portrait, de la signature de Louis Gustave Ricard (Marseille, 1823, Paris, 1873).



Ce peintre occupe une place très importante dans l'histoire de la peinture française du XIXe, et nombre de ses oeuvres sont conservées dans les musées (notamment au musée d'Orsay).



Il a été rendu célèbre notamment par ses portraits (Portrait de Mme de Calonne, musée d'Orsay).



Il existe une "étude pour le tableau du Louvre" de Melle de Calonne et un dessin au crayon référencés lors de ventes en 1920 et 1950 (Source: Benezit, 1954)





Gustave Ricard, Autoportrait, musée d'Orsay.



portrait deb la Vicomtesse de Calonne, Ricard, Musée d'Orsay.

allègement de vernis


Les altérations du vernis ont entraîné des modifications de l’aspect de surface et de la lecture de l’œuvre (matité – brillance). Pour restaurer l’aspect original de la peinture, il est nécessaire de solubiliser ou de supprimer une partie de ce vernis, à l’aide de solvants organiques.
Les premiers tests laissent penser que l’isopropanol est un bon solvant du vernis de l’œuvre.


Etat de la surface picturale




L'aspect de surface de l'œuvre est très peu satisfaisant. Un nettoyage sélectif a dû être effectué sur le visage seulement. Les différences d’épaisseur de vernis entre le fond sombre et le visage clair entraînent des matités et des brillances très préjudiciables à la présentation de l’œuvre. Cet aspect est encore accentué par les craquelures prématurées visibles notamment dans la partie droite de la chevelure.

L’ensemble de la couche picturale est cependant en bon état de conservation, malgré de nombreuses zones de craquelures prématurées liées à la technique et aux matériaux du peintre

Etat du revers

L’œuvre est peinte sur un papier marouflé sur panneau de bois, soutenu par un parquetage. L’ensemble présente un léger empoussièrement. Sur le revers, les inscriptions suivantes sont visibles :
- « Alain de Chatellus », sur une étiquette de papier
- « 13708 », sur une étiquette de papier
- « 13708 », inscription manuscrite sur le parquetage
- « 424 », inscription manuscrite sur le parquetage
- « 21.373 », sur une étiquette de papier
- « Melle de Calonne », gravé dans le bois du parquetage
- Inscription liée au parquetage : « .se COR V_ / Rue Laffite 15 bis »

Le pourtour du parquetage avait été recouvert d’un papier de bordage partiellement disparu.

démontage du cadre


Les pointes qui maintenaient le cadre au revers du panneau ont été tordues et arrachées à la pince. Le cadre a été mis de coté pour restauration.


Ce démontage laisse apparaître sur le pourtour de la face de l’œuvre une différence de biseau indiquant que le traitement précédent a été effectué sans démontage de ce dernier.