Vierge à l'Enfant et saint Jean Baptiste, Copie de 1858 par Mme Blanchard d'après l’original de Lorenzo Sabattini (1572, musée du Louvre)


Copie d'après La sainte famille avec St Jean-Baptiste de Lorenzo Sabatini (vers 1530-1576) datant de 1572 et provenant de la Galerie royale de Milan (saisie militaire : aujourd'hui conservé au musée du Louvre).

Cette œuvre fait partie des copies nombreuses commandées pour les églises de tout le pays sous la Restauration et le second Empire[1] : Jusqu'en 1878, les commandes et achats de copies représentent jusqu'à 30 % des acquisitions[2] ; Les modèles originaux sont généralement conservés au Louvre (comme c’est le cas ici) et de très nombreux copistes sont des femmes[3].  

Deux autres versions de la Ste Famille avec St Jean-Baptiste existent, à  Pont-de-Salars (Aveyron), commande du 8 avril 1853 (par : Henriette TOUSSAINT, pour 800 francs. Dim : 174,5x 147,5) et à Chissay-en-Touraine (commande de 1860 à Mme LONEZ pour un montant de 800 f. Dim : 170 x 160)[5].
Ces copies sont commandées ou réalisées par le copiste et vendues après réalisation ; pourtant, il semblepossible que l’Etat ait fourni les matériaux constitutifs de l’œuvre, comme cela a été le cas à Versailles[6], et comme le suggère le cachet de fournisseur au revers de l’œuvre qui est le même que pour une autre commande de copie (mettre en relation avec la copie de la Crucifixion de Prud’hon conservée à la Cathédrale St Gatien de Tours, chapelle des Fonds Baptismaux).



Description et constat d'état



a)     Support

·                  Description du support :
Toile de lin au tissage sergé. Les bordures de toile sont enduites d’une préparation blanche, probablement à base de céruse (blanc de plomb). La préparation a migré au revers de la toile par zones, signe d’une enduction légère.

Le revers de la toile porte deux cachets, où le nom du fournisseur se devine : « Colin ».

Un relevé a été réalisé pour être ajouté à la base Labreuche et publié sur http://www.labreuche-fournisseurs-artistes-paris.fr/maison/colin-rebourg ). 

Toile tendue sur le châssis par des semences rouillées et oxydé qui ont cuit la toile, entrainant des déchirures locales à l’origine d’une désolidarisation toile/châssis complète. Il en résulte un support lâche, déformé, déchiré localement. Très fort empoussièrement et présence d’importants scrupules au revers. Le châssis porte les traces d’une infestation xylophage.

·                  Etat du support : La toile est maintenue au châssis par des semences largement oxydées, les bordures montrent une reprise antérieure de la tension (traces de pince à tendre dentelée) ; la rouille des semences a créé des déchirures localisées de la toile, entraînant la désolidarisation de la toile au châssis sur toutes les bordures. La tension du support est très mauvaise, entraînant de nombreuses déformations. La toile est cuite et cassante, montrant les marques des traverses du châssis. Empoussièrement très important au revers, provoquant d’importants scrupules / et déformations indurées associées.

b)      Couche picturale et surface de l’œuvre

-         Description de la couche picturale : peinture à l’huile en demi-pâte et glacis. Préparation blanche et fine (trame de la toile visible à travers cette préparation), apparaissant comme cassante (voir infra).
-         Etat de la couche picturale : Amorces de soulèvement liées aux déformations du support. La couche picturale est entièrement chancie (microfissuration du vernis et en partie de la couche picturale) : cette altération est liée à l’humidité et à la fragilité du vernis et du liant face aux variations d’humidité. La présence de certaines moisissures peut augmenter ce phénomène, et emble être la cause de pulvérulences des sous-couches rouges ou brunes de certaines zones (drapés de la Vierge, fonds arrière de St Jean-Baptiste). Ces dégradations rendent l’œuvre illisible et constituent une menace à court terme.


  Interventions


·                 Intervention sur le support

-         Constat d’état complet et précis
-         Protection des bordures
-         Dépoussiérage +++
-         Démontage du châssis
-         Mise à plat de bordures et nettoyage
-         Relaxation de la toile pour les déformations indurées avec mise en extension sur châssis alu extenseur (BAL2). reprise du format initial

-         Pose de bandes de tension (stables et réversibles, Beva film et tissu polyester inerte aux variations dimensionnelles)
-         Remontage sur châssis original traité.

 

·                 Interventions sur la couche picturale

-         Refixages (+++++)
-         Dévernissage (ou allègement si suffisant) et suppression des repeints
-         Reprise de saturation générale (résine de très bas poids moléculaire, Regalrez)
-         Mastic des lacunes
-         Réintégration illusionniste des lacunes sur mastics réagréés )


·                 Autres interventions


-    -         Protection arrière anti-poussière

-         Rapport d’intervention documenté (interventions, produits utilisés, photos avant pendant après).

-         Remise en place de l’œuvre, réencadrement avec pattes adaptées (par le restaurateur de cadre David Doreur).


Ont participé à cette restauration :


Lucie Grollier, étudiante en Arts Plastqiues à l'UCO (Angers)
Lucile Mathieu, étudiante en Hisoire de l'art à l'UCO (Angers)
Adélaïde Ruchaud, étudiante en Hisoire de l'art à l'UCO (Angers)
...



[1] Copier créer: De Turner à Picasso : 300 oeuvres …1993 et L'Art et ses institutions en France, Gérard Monnier, 2014 :‎ « ... Sous le second Empire, la plupart des commandes de tableaux passées par l'administration des beaux-arts, rattachée au ministère d'Etat et de la Maison de l’Empereur concerne des programme plus conventionnels (qu’avant) pour les années 1851-1860 on a pu montrer la place prise par la peinture religieuse, puisque sur un total de 2000 tableaux commandés environ, 908 sont des tableaux à sujets de dévotion (pour une bonne part des copies). » …« pour une commande en général au 19e, ‘est le résultat de la sollicitation du commanditaire par l’artiste (…) Bruno Foucart à montré que pour les Eglises, le clergé est largement demandeur ».
[2] Clarisse Duclos, « Le dépôt de l'État, Administration des Beaux-Arts : quelques éléments pour aider à sa compréhension », dans cat. Exp, cité dans Les cahiers d'histoire de l'art, Numéro 4, p. 134, 2006.
[3] Op. Cit.
[4] Marie Monfort, ‎Gisèle Caumont, 2006.
[5] source : base culture.gouv /mistrals
[6] Voir références Pascal Labreuche, dont Jacquinot, Armelle, « Etudier l’art moderne – les marchands d’art et la location de tableaux dans la pratique de la copie – 1820-1850 », dans Nerlich, France et Bonnet, Alain (dir.), Bertinet, Arnaud (collab.), préface de Sébastien Allard, Apprendre à peindre. Les ateliers privés à Paris, 1780-1863, Rennes, P.U.R., 2013, coll. «  Perspectives historiques », p. 177-189.